Photos Le bras d’honneur de Władysław Kozakiewicz [Pologne], photographie de Rich Clarkson, 1980.
Le bras d’honneur de Władysław Kozakiewicz [Pologne], photographie de Rich Clarkson, 1980.
© Rich Clarkson/Getty Images

Władysław KOZAKIEWICZ

La victoire de Władysław Kozakiewicz est interprétée comme le symbole d’une aspiration à la démocratie et d’une résistance des Polonais face à la domination soviétique.

Aux Jeux Olympiques de Moscou, en 1980, Władysław Kosakiewicz remporte la médaille d’or du saut à la perche lors d’un concours resté dans l’Histoire. Il naît en 1953 en Lituanie de parents polonais rapatriés ensuite en 1958 dans le cadre de la politique d’échange des populations orchestrée par l’URSS. Il s’impose la première fois lors des championnats de Pologne en 1974 avant de se faire connaître sur la scène internationale l’année suivante en établissant un record d’Europe à 5,60 mètres. Il améliore ensuite ce record à trois reprises jusqu’en 1980. Władysław Kosakiewicz est en outre champion d’Europe en salle et champion du monde universitaire. Quelques semaines avant les Jeux Olympiques de Moscou, il établit un record du monde à 5,72 mètres, dépassé peu de temps après par les Français Thierry Vigneron d’abord et Philippe Houvion ensuite.

Władysław Kosakiewicz figure donc parmi les favoris du concours olympique et ce, d’autant plus, qu’il est présenté comme revanchard. Blessé, il n’a pu disputer réellement sa chance à Montréal en 1976. Il s’impose finalement en établissant même un nouveau record du monde à 5,78 mètres à la suite d’un duel avec le Soviétique Konstantin Volkov soutenu fiévreusement par le public. En réponse à la franche hostilité des spectateurs russes, Władysław Kosakiewicz leur adresse un bras d’honneur. L’image fait le tour de monde — à l’exception des pays du bloc de l’Est — et devient le symbole de l’aspiration à la démocratie. L’URSS voit dans ce geste une insulte « contre le peuple soviétique » et demande au CIO que sa médaille lui soit retirée. Le gouvernement polonais évoque un « spasme musculaire » pour justifier le geste et refuse de sanctionner celui qui est élu « sportif polonais de l’année » au regard de sa popularité. Le pays est alors plongé dans un combat politique majeur, et à la fin du mois d’août 1980, à l'issue de 14 jours de grève au chantier naval Lénine de Gdansk, le vice-Premier ministre Mieczysław Jagielski cosigne avec Lech Wałęsa l'accord de Gdańsk, devant l'assemblée générale des délégués des entreprises en grève dans la région. C’est le point de départ d’un processus qui, dix ans plus tard, met fin au Bloc de l’Est.

Le geste de Władysław Kosakiewicz est interprété dans ce cadre comme un symbole de résistance sur fond de contentieux historiques anciens avec l’URSS, et en lien plus immédiat avec la crise sociale qui monte en Pologne. Après son émigration en Allemagne de l’Ouest, alors qu’il est trois fois champion de ce pays, la Pologne s’oppose toutefois, en vertu de la réglementation internationale, à sa participation aux Jeux Olympiques de Séoul en 1988. Quoiqu’installé en Allemagne définitivement — il y devient entraîneur —, il ne rompt pas totalement avec son pays. Une fois celui-ci revenu à la démocratie, il est élu au conseil municipal de Gdynia et se présente en 2011, sans succès, sur une liste polonaise aux élections européennes.

Władysław KOZAKIEWICZ
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