Photos « Emil Zátopek [Tchécoslovaquie] le phénomène de[nbsp]la grande distance : deux médailles d’or, deux[nbsp]records olympiques », couverture de presse in[nbsp]Lo[nbsp]Sport Illustrato, 1952.
« Emil Zátopek [Tchécoslovaquie] le phénomène de la grande distance : deux médailles d’or, deux records olympiques », couverture de presse in Lo Sport Illustrato, 1952.
© Coll. CASDEN

Emil ZÁTOPEK

Aux Jeux d’Helsinki en 1952, Emil Zátopek accomplit l’exploit jamais égalé de remporter la médaille d’or sur 5.000 mètres, 10.000 mètres et le marathon.

Emil Zátopek est considéré comme l’un des grands athlètes de l’Histoire et un symbole de paix au temps de la Guerre froide. Né le 11 novembre 1922, il est d’abord ouvrier dans une usine de chaussures tout en étudiant la chimie le soir. Il remporte son premier titre national sur 5.000 mètres en 1944, mais c’est seulement à la fin de la guerre, en embrassant la carrière militaire, qu’il bénéficie de bonnes conditions d’entraînement. Aux Jeux Olympiques de Londres en 1948, alors que son pays vient de passer dans le camp communiste à la suite du « coup de Prague » et que la Guerre froide commence, il décroche la médaille d’or du 10.000 mètres et échoue de peu sur la deuxième marche du podium sur le 5.000 mètres. En 1949, il bat son premier record du monde : il en détiendra 18 sur plusieurs distances.

Aux Jeux d’Helsinki en 1952, Emil Zátopek accomplit l’exploit jamais égalé de remporter la médaille d’or sur 5.000 mètres, 10.000 mètres et le marathon. Un exploit désormais dans les annales de l’Olympisme. Dans le climat de la Guerre froide croissant, Emil Zátopek bénéficie d’une immense popularité de part et d’autre du rideau de fer. À l’Ouest, la « locomotive tchèque », au style de course pourtant disgracieux, est admiré pour ses performances et respecté pour sa capacité à endurer la souffrance qu’exprime son visage déformé par l’effort. Il est aussi apprécié pour ses qualités humaines : la photographie de l’embrassade avec son épouse, Dana Zatopkova, vainqueur de l’épreuve du javelot, à l’arrivée du marathon, fait le tour du monde. À l’Est, Emil Zátopek est l’instrument de la propagande et un « modèle communiste » en tant qu’ancien ouvrier et champion d’exception. De même, ses entraînements acharnés tout autant que méthodiques sont à l’image des valeurs d’effort, de travail et d’organisation promues par les régimes communistes — dont ses victoires traduisent l’efficience —, et qui deviennent des thèmes de propagande promus dans le monde entier.

Pour autant, à Helsinki, Emil Zátopek apparaît comme le symbole de la détente entre les deux blocs dans le cadre de la stratégie pacifiste développée alors par l’URSS. Il participe aux mises en scène de fraternisation entre athlètes de l’Est et de l’Ouest. Il devient ensuite un inlassable ambassadeur de la paix et de l’amitié entre les peuples dans le cadre d’organisations ou de manifestations dirigées depuis Moscou. Bien après la fin de sa carrière aux lendemains des Jeux Olympiques de Melbourne en 1956 (sixième du marathon), la foule du Printemps de Prague en 1968 le pousse à incarner le mouvement réformateur tchécoslovaque pour un « socialisme à visage humain ». Refusant les nombreuses propositions d’exil, il est exclu de l’armée dont il est colonel, déchu de toutes ses fonctions officielles et obligé de travailler dans une mine d’uranium. Il est devenu, pour le régime, un « traître ». Pour autant, il ne renonce jamais à ses idées, ni à sa volonté de soutenir la démocratie de l’autre côté du rideau de fer. Il est enfin réhabilité en 1975 et est honoré en 1990 par le président Václav Havel, au retour de la démocratie dans son pays. Emil Zátopek meurt le 30 décembre 2000.